Benoît (Poelvoorde) joue Auguste (Maquet), et Gérard (Depardieu) joue Alexandre (Dumas). Le premier est « l’autre Dumas, le nègre ». Le second est le premier Dumas, le vrai.
Le film est une réussite, du début à la fin et sur tous les plans, ce qui n’est malheureusement pas l’avis de toutes les critiques, qui ont apparemment pris la décision de ne plus jamais rien aimer de peur de passer un bon moment et de ne savoir pas comment gérer ce sentiment nouveau. Par ailleurs, un lundi à 22h25 nous n’étions que 7 aux Halles, dans une salle petite… curieux… Bref !
De quoi s’agit-il ? Auguste Maquet est un homme de l’ombre, à l’ombre du gigantesque et dantesque Dumas. Il n’est pas à proprement parler un nègre, il est beaucoup plus que ça. On va les suivre dans les semaines qui précèdent la révolution de 1848, alors que les deux écrivains s’attèlent à l’écriture parallèle d’une pièce et d’un roman.
Ils sont inséparables et irréconciliables.
Inséparables parce que, d’un côté, le Grand-Alexandre ne peut se passer de son « collaborateur » pour écrire ; et de l’autre, le trop sérieux Maquet ne peut se passer de son maître qui donne à la rigueur de son style la flamboyance nécessaire à tout succès littéraire.
Irréconciliables parce que les caractères s’opposent.
Dumas/Depardieu sort de lui-même, sort de l’écran, dévore tout ce qui passe : animaux, femmes, paysages… Il empoigne son désir et poursuit son chemin, comme un brise-glace qui fend la banquise-France selon sa vision, sans tergiverser à chaque centimètre pour savoir si le cap est bon. Il avance fort et juste, selon son intuition qui est toujours la bonne.
À l’inverse, Maquet/Poelvoorde est un travailleur plus appliqué, plus contraint, plus serré. Alors qu’il le voudrait, il ne parvient pas à sortir de ses gonds. Il se retient, il est fidèle et lorsqu’une passion amoureuse se dresse devant lui, il joue de maladresse, se prend les pieds dans le tapis entraînant dans sa chute un peu tout le monde, et même le régime politique. Et dieu sait que dans ce film le contexte historique est passionnant à observer, en toile de fond, par petites touches impressionnistes.
Ces histoires de nègres font toujours un peu fantasmer. Se dire que derrière l’histoire officielle, derrière la plume de tel ou tel il y a un oublié, un être talentueux, mais qui, pour mille raisons, n’accède pas au rang d’immortel de la littérature. Le sentiment de prendre part à une œuvre qu’il n’aurait probablement pas été capable d’initier se mêle à l’amère douleur du manque de reconnaissance. Maquet ne peut qu’être un wagon de la locomotive Dumas et Dumas ne peut avancer sans cet attelage. Peut-être le plus beau film qui soit sur le travail en équipe…
Pour le reste, tout est réussi : les costumes, les décors, la musique, la photo. Les personnages secondaires très bien servis. La réalisation est neutre ; ce n’est peut-être pas plus mal, ça n’entrave pas le déroulement du récit ni le plaisir complètement jouissif qu’il y a à observer notre Gérard national déployer tout son talent avec une déconcertante facilité.
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