Les beaux gosses
C'est un bout de notre histoire à tous: collégien, mal dans sa peau, pas dégourdi, pas dévergondé. Très léger, le film fourmille en répliques potaches et en clins d'oeil drôlissimes sur ce que le quotidien d'un tel personnage peut bien produire. C'est simple, c'est fort, c'est efficace. Mais ça ne va pas chercher bien plus loin. Le film trouve les résonances qu'il peut en chacun de nous, et exhume des sensations oubliées. C'est déjà pas mal, et après tout, "chacun sa technique de roulage de pelle".
J'ai tué ma mère
À contrario, J'ai tué ma mère avance une réflexion et se centre sur un aspect (primordial et ultime) de la construction de soi: le lien maternel. Un film très personnel, où Xavier Dolan (19 ans), qui a écrit le scénario (à 17 ans) et co-produit le film, tient aussi la caméra et incarne le rôle principal. Je pense qu'on peut parler de petit génie. On ne blâmera pas le jeune homme de parler de lui, c'est toujours comme ça qu'un artiste commence, en réglant une première question sur un mode très autobiographique. Je pense que tout un chacun se retrouve en Hubert Minel qui navigue en pleine tornade intérieure et sans boussole. En résumé, il dit à sa mère ceci:
Je te déteste. Tous ces gestes que tu fais m'horripilent. Être confronté à toi dans cette sombre maison m'est insupportable. Rien ne va. Et pour couronner le tout tu me hais.
Mais en même temps, en réfléchissant, peut-être bien que tu m'aimes de cet indéfectible amour maternel. Et comment alors puis-je le refuser cet amour, pour m'émanciper et vivre MA vie. Ou alors, si je ne le refuse pas, comment peux-tu toi accepter de voir en moi l'adulte-en-devenir qui pense et agit indépendamment de ta volonté. Ce n'est pas ce qui se passait lorsque j'étais enfant et que j'étais tout à toi, puisque le monde extérieur se résumait à ce que, ma main dans la tienne, tu me prêtais à voir.
En tout cas, si tu mourrais, je serais orphelin. Et c'est quand même bien pire de n'avoir personne à détester ou aimer. Au moins ai-je encore le choix. Mais ai-je besoin de t'aimer pour t'aimer. Ca coule tellement de source que même en éclaboussant partout la haine sincère que je te porte, eh bien ce lien, duquel je tiens mon avènement terrestre, demeurerait: tu es ma mère, tu es l'origine de ma vie, tu n'en es pas la finalité. Va, je ne te hais point.
"Jamais nous ne goûtons de parfaite allégresse: nos plus heureux succès sont mêlés de tristesse" Pierre Corneille, in Le Cid.
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